. (Illustration Stefano Rossetto)
Alors que dimanche 22 mars un votant sur quatre a fait le choix de l’extrême droite, nous, élus lycéens de différentes académies de France, écrivons cette tribune pour dénoncer le climat malsain qui règne dans notre pays et montrer notre attachement aux valeurs de la République, mises à mal par les extrêmes.
Contrairement aux idées reçues, les jeunes peuvent et savent s’engager. En tant qu’élus, nous pensons que l’engagement passe d’abord par les urnes et que la nouvelle génération doit s’approprier les élections pour faire entendre sa voix. Hélas, ce n’est pas le cas de tous puisque aujourd’hui, 61 % des 18-24 ans ne votent pas. Cette abstention peut s’expliquer par un désintérêt, regrettable mais certain, de la chose publique. Néanmoins, elle reflète avant tout le sentiment d’abandon de la classe politique qu’éprouve une certaine partie de la jeunesse aujourd’hui. Mais cet abandon peut parfois amener au choix malheureux de l’extrémisme, qu’il soit religieux ou politique. Tous deux dangereux, ils utilisent la peur et les doutes des peuples pour prendre le pouvoir en véhiculant la haine, ce que nous refusons pour le pays des droits de l’Homme.
En tant qu’élus lycéens, nous souhaitons notamment montrer notre opposition à la vision rétrograde de l’éducation proposée par les extrêmes. Prenons pour exemple le «Projet pour l’Éducation» du Front National. Il y est écrit que «L’École n’est pas «un lieu de vie» où l’enfant construirait son savoir par lui-même». Les jeunes n’auraient plus la possibilité de créer de la pensée mais auraient pour seul dessein éducatif d’apprendre et d’emmagasiner des leçons passivement. Aucun échange intellectuel, aucun débat n’aurait lieu si bien que l’esprit critique de notre jeunesse serait injustement entravé, compromettant à terme la liberté d’opinion et d’expression, socle de notre République comme l’ont montré très justement les Français après les événements de janvier. Ces mesures proposées par le FN empêcheraient donc la naissance de citoyens engagés, conscients des enjeux de la vie politique de notre pays.
La neutralité de l’éducation à laquelle nous avons accès et la liberté qu’elle assure serait menacée par les extrémistes. Par exemple, il serait possible que la laïcité devienne un exutoire à la haine religieuse, que la construction européenne soit dépeinte comme la progression d’un système antidémocratique, et que l’étude d’autres cultures et civilisations soit considérée comme un déni de notre héritage judéo-chrétien. Or, nous, lycéens mais aussi citoyens, refusons un enseignement qui favoriserait le message politique à la vérité.
Nous qui croyons au progrès et aux valeurs de la République, pensons que le système éducatif doit s’adapter à l’élève et lui donner une liberté de penser. Nous allons à l’encontre du Front National qui propose des mesures qui astreignent l’élève à subir son éducation, visant ainsi à mettre en place une société unanimiste dans laquelle l’individu doit s’effacer derrière la masse.
Aujourd’hui, c’est en allant au delà de nos sensibilités politiques, certes différentes mais qui s’inscrivent toutes dans le cadre républicain, que nous, citoyens de demain, nous opposons à tout processus visant à déstabiliser les principes fondamentaux de notre démocratie : liberté, égalité, fraternité, mais aussi solidarité et laïcité. Ces valeurs, avec lesquelles nous avons grandi, sont indispensables à la construction d’un environnement sain puisqu’elles permettent une vie épanouie dans la collectivité. Oui, des réformes peuvent être nécessaires mais la destruction de cet équilibre serait une grave erreur qui menacerait les principes républicains. C’est en faisant ce triste constat que nous avons choisi de nous mobiliser contre la haine et l’intolérance, ces maux qui se développent dans notre société mais contre lesquels nous ne cesserons de nous battre.»
Auteurs : Cassandre LIBERMAN (Paris), Fabien LASSALLE-HUMEZ (Lille), Jan BORREGO STEPNIEWSKI (Paris), Chaïmat SILENY (Nantes), Julie GOLAZ (Orléans-Tours), Leïla MATHIAS (Lyon), Simon PERCELAY (Nice).
Signataires : Nicolas HEYN (Montpellier), Cédric SCHERER (Strasbourg), Clémentine FAIDHERBE (Versailles), Nicolas CASSE (Versailles), Maëva PAPINI (Toulouse), Léa NICODEME (Lille), Valentine MONTEIL (Rennes), Adèle PARROT (Paris), Léo HUSSAIN (Nantes), Tristan MITATRE (Rouen), Lucas DEWIER (Besançon), Thomas MONTEIRO (Versailles), Thomas BUISSON (Limoges), Jules TERRIER (Grenoble), Philippe PERNOT (Nice), Caroline PARE (Nantes), Cely Gaddacha (Nice), Dylan ROLAND (Besançon), Guillaume LATRILLE (Bordeaux), Côme JAULIN (Paris), Antonin ALBERTY (Rouen), Elise LANGAGNE (Lille), Anne-Charlotte VANSON (Lille), Iris MADELINE (Paris), Elias DRICI (Lille), Maayane PRALUS (Paris), François GOSSET (Paris), Gianni FACHINETTI (Paris), Arthur NOWICKI (Paris), Naïm SHILI (Versailles), Pierre CHOQUET (Lille), Louis BOURGEUS (Poitiers), Séléna BENNATI (Lille), Albane MAZET (Orléans-Tours), Tom VICO (Caen), Sylvain FOURNIER (Paris), Selya MAGY (Lille), Margot LEMAIRE (Paris), César BOUVET (Grenoble), Nathan LE POTIER (Caen), Arthur MOINET (Nantes), James EVERED (Orléans-Tours), Adrien RUELLOU (Orléans-Tours), Pierre MONQUET (Créteil), Lauryn CAROLE (Martinique), Yasar DASDEMIR (Nancy-Metz), Chaffanty ADIGUE (La Réunion), Arman GRUMEL (Paris), Amélie MIREAU (Paris), Victor BUS (Paris).
© Libé 2022
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